Mode d’emploi pour une vie chaotique [1]
« Je ne fais jamais la même erreur deux fois. Je la fais cinq ou si fois, histoire d’être sûr. » Auteur inconnu
Ok les enfants, parlons de moi.
… C’est fou ce que publier mes galères sur un site plutôt que sur facebook me donne l’impression d’être imbu de moi-même. Mais ce n’est pas le sujet. Les textes suivants ne sont pas passés loin des oubliettes puisqu’ils sont en rapport avec Ninja Warrior, émission plus ou moins compétitive et plus ou moins de parkour à laquelle j’ai beaucoup hésité à participer [1]. Mais il aurait été dommage de laisser ces souvenirs s’enliser dans les ténébreuses abysses de ma mémoire défaillante.
Ceci sera écrit en deux partie : la première témoignera de mon problème au cerveau, qui consiste à être régulièrement très stupide. Ce qui contribue à la fois à me compliquer la vie, et à me la rendre intéressante. La seconde [2] rendra compte du casting de Ninja Warrior à proprement parler, pendant lequel j’ai eu le plus grand plaisir à donner l’impression d’être complètement perché. Ce qui était étonnamment facile et naturel.
Planning: target destroyed
Nous sommes le mercredi 8 au soir, le casting a lieu le vendredi 10 février. D’ici là, mon programme est clair : il me reste un peu plus d’une journée pleine pour travailler sur mes faire-parts de mariage [3] et sur un article à propos de l’appel de la compétition d’un point de vue subjectif [1]. Tout semble réglé au quart de poil. Autant dire que c’est diablement inquiétant…
Je m’attelle donc à la tâche, sur mon fidèle ordinateur rose qui tient toujours la route malgré les ravages du temps. Son teint défraîchi, ses articulations qui craquent et ses fonctions internes faiblissantes n’altèrent pas le moins du monde son ardeur à la tâche. Au travail.
« Driiiinnnng!! » Une de mes sœurs m’appelle.
» Salut David ça va ?
– Viens-en au fait Noémie, je sais que tu as besoin de moi. » – je suis mauvaise langue.
» Oui tout à fait ! J’ai oublié mes clés et mon copain n’est pas là, je suis enfermée dehors.
– Ok viens chez moi !
– Il est parti pour la semaine donc c’est encore plus la galère.
– Ok viens chez moi pour le reste de la semaine !
– Et j’avais invité notre sœur Déborah, je ne sais pas quoi en faire de celle-ci non plus.
– Ok venez chez moi toutes les deux pour le reste de la semaine, mes 9 m² sont vos 9 m² ! !
– Cool merci ! On arrive.
– Tu es sûre que c’est tout ?? »
Elle est sûre.
Ça me fait plaisir de rendre service. Toujours. Vraiment, c’est ça les valeurs de la famille. Ce service rendu constituera en effet une dette, dont je pourrai demander le remboursement à tout moment. Très pratique. Mais j’aurais préféré amorcer mon plan machiavélique de domination familiale un autre jour. Là ça ne m’arrange pas, d’autant plus que je viens de réaliser qu’il est grand temps de mettre en place un autre vil projet. Ce dernier visera à ferrer une demoiselle, à m’assujettir ses sentiments au travers d’un perfide et tentaculaire jeu de séduction. En effet, la Saint Valentin approche dangereusement.
Il me faudra donc offrir des fleurs à ma douce et tendre, de peur qu’elle ne m’aime plus.
Je n’aime pas trop ces fêtes commerciales où l’amour est convenu et devient une valeur marchande encaissée à date fixe ; mais lorsqu’on vit encore à une dizaine de milliers de kilomètres de distance, une attention est toujours la bienvenue. La convoitise m’habite, elle m’inspire un habile stratagème. Je ne peux pas les faire livrer après la saint Valentin, autrement mon doudou d’amour risque d’être déçue et de me quitter. Je ne veux pas les faire livrer le jour même. Je vais donc les faire livrer quelques jours avant ! Pourquoi pas le samedi, de façon à ce qu’elle puisse profiter des fleurs tout le week-end ?
Quelques pérégrinations internautiques m’amènent à constater que les frais de livraison du fleuriste sur lequel j’avais jeté mon dévolu l’année dernière ont énormément augmenté. Je me dois d’être un goujat comme tout mec qui se respecte, je passe donc quelques heures à chercher – sans succès – une alternative meilleur marché. Pour compenser j’y adjoins un poème. Pas un poème de ma composition, je ne sais pas faire. Pas quelque chose de trop long, le nombre de caractères est limité. Ce sera donc le haiku suivant.
« Truly I love you
Your love, My love, Together
Love in God be one »
Stolen from R. W. Hancock
J’espère qu’après ça elle comprendra qui c’est le bonhomme.
Ce n’est pas tout. La semaine d’après, j’ai aussi une résidence de spectacles à Sommières, un patelin très joli mais complètement perdu. Il n’y a pas de gare, les bus le desservent mal, et le covoiturage n’est pas non plus une option. Comment y aller ? Faire du covoiturage jusqu’à une ville alentour et terminer en stop ? J’ai beau chercher pendant quelques heures, en milieu de semaine rien ne semble convenir. Je devrai donc partir un jour plus tôt pour arriver à temps. Encore une journée productive à enlever de mon emploi du temps.
Brain: 404 not found
Jusqu’à présent, rien de bien stupide, simplement des contretemps. L’histoire de ma vie résumée en quelques lignes : 80% d’organisation inutile, 20% de travail effectif. Tant pis pour mes projets qu’il faudra reporter ! J’ai l’habitude… Au moins j’ai l’assurance que le voyage jusqu’au lieu du casting est une affaire rondement menée.
J’irai à Lyon en train à 6h du matin pour rejoindre des amis, on covoiturera jusqu’à Paris, on passera le casting ensemble, puis l’après-midi on s’entraînera avec d’autres traceurs qui nous hébergeront pour la nuit. On reviendra le lendemain, ils me lâcheront sur le péage pour que je rentre en stop jusqu’à chez moi. Nous sommes la veille du départ, il est temps de passer un petit coup de fil pour confirmer tout ça.
» Allo Samy, juste pour confirmer, pour le casting c’est toujours bon ?
– Ouais ouais t’inquiète, on te prend à la gare de Lyon Part-Dieu à 7h, on va à Paris ensemble, puis on se fait héberger par les Hit the Road.
– Ok nickel, c’était juste pour vérifier ! Je suis désolé j’ai 10 000 choses à faire là, j’ai pas trop le temps de parler…
– Pas de problème, on se voit la semaine prochaine de toute façon !
– Euh, on se voit demain aussi quand même ! Il est con.
– Demain ? Y a quoi demain ?
– Attends rassure-moi, tu te rappelles de quoi on parlait y a 30 secondes ?
– Bah oui du casting !?…
– Et donc ? Quel est le rapport entre demain et le casting ?
– J’sais pas mec, mais nous le casting on le passe la semaine prochaine hein !
– … »
Le reste de la conversation n’est pas si intéressant : je bafouille, bredouille, cafouille. Encore mon problème d’intelligence, qui commence à devenir pesant…
M’enfin. Maintenant, il faut trouver une solution alternative. Où la chercher ? Y a-t-il une solution, d’abord ? Et est-ce que je veux toujours participer à ce fichu casting ? J’ai eu tant de réserves sur cette émission que j’en ai écrit un article ; je suis déjà bien trop occupé dans ma vie ; et une nouvelle barrière vient de s’ériger. Serait-ce un signe ?
Non.
J’ai beaucoup trop tergiversé pour réussir à prendre une décision, ce n’est pas pour revenir sur mes engagements maintenant. Je vais galérer, mais je trouverai une solution ! En stop ? Non, il faudrait partir tout de suite, j’ai envie d’avancer un minimum mon programme de la journée. Et le retour de Paris est toujours compliqué, j’ai trop d’énergie à épargner pour m’engager là-dedans. Eh oui, je m’embourgeoise ! En train ? À 118€ le billet, soyons raisonnable, il y a des limites à l’embourgeoisement. Le covoiturage ? Trop tard, plus de voitures disponibles pour partir ce soir. Et de toute façon, il faudrait aussi lancer une nouvelle enquête pour trouver quelqu’un pour m’héberger au dernier moment. Je n’aime pas trop réclamer.
Quoi d’autre ? Le bus ! Mieux encore, un bus de nuit ! Ce serait parfait : je travaillerais l’après-midi, je voyagerais et je dormirais dans un même élan, et j’arriverais à temps pour le casting. Pour le retour, un covoiturage fera l’affaire. Ne me reste plus qu’à savoir où je vais finir ma nuit lorsque j’arriverai à 5 h du matin. Mais ça, j’aviserai le moment venu. Je ne me fais aucun souci pour trouver un endroit confortable, isolé, en hiver et en plein Paris.
Moyennant plus de temps qu’il n’en faut pour l’écrire, tous mes problèmes sont résolus. Tous ? Non ! Car un cerveau peuplé d’irréductibles neurones subversifs résiste encore et toujours à l’appel de l’ordre.
Je choisis mon billet sur le site de OuiBus, je paie, je reçois le reçu par mail. Je jette un œil au reçu… Et cela va de soi, j’ai acheté un billet Paris-Grenoble au lieu de Grenoble-Paris. Je prends en vitesse mon retour en covoiturage, je reviens chez OuiBus, heureusement il est possible de changer un billet. À condition que la modification concerne les horaires, l’identité du voyageur, les services à bord… Autrement dit tout sauf la destination.
Problème. J’appelle la hotline, dont le message d’accueil me précise très clairement le même discours. J’attends quand même, un être humain sera peut-être plus compatissant ! Et en effet, gros coup de chance associé d’un geste commercial, l’homme me change mon billet. Et tant qu’à faire, puisque ce billet-là est moins cher, il me rembourse la différence !
» J’ai bien de la chance dis donc ! » me dis-je alors qu’un numéro inconnu m’appelle.
» Salut c’est pour le covoiturage ! Tu es bien à la gare de Lyon ?
– … Euuuuh… »
Je suis vraiment trop prévisible. J’ai pris mon retour pour aujourd’hui plutôt que pour demain… Est-ce que je me trompe, ou mes pensées auraient besoin d’une bonne vidange avant de repartir de plus belle ? Enflammé par le coup de bol chez OuiBus, je tente d’appeler BlablaCar. Il est bien entendu en principe impossible d’annuler ou d’échanger après le départ puisque le conducteur a réservé la place pour moi. En principe ? Ouais, en principe [4]. Mais puisque j’ai de bonnes critiques sur mon profil, BlablaCar agrée un geste commercial et me rembourse la moitié du trajet !
Non ce n’est pas de la chance. C’est une compensation de mes malchances, voilà tout. Mon cerveau est mal en point, laissez-moi profiter d’un peu de discrimination positive.
Pendant le reste de la soirée, j’apprends que les fleurs pour l’objet de mes désirs ont été livrées à la mauvaise adresse ; puis je me prends une amende dans le tram. Alors que j’ai un abonnement, mais pas ma carte sur moi. Alors que j’ai ma carte sur moi, mais que je ne la retrouve pas en face des contrôleurs. Et alors qu’il n’y a jamais de contrôleurs. J’ai épuisé tous mes jokers, tant pis pour moi !
La suite ICI le mardi 4 avril à 18h ! [2]
[1]↑ Pourquoi est-ce que j’ai hésité à participer à Ninja warrior ? La réponse dans cet article : http://david-pagnon.com/fr/competition-parkour-beaux-principes-confrontes-a-pratique/
[2]↑ Seconde partie, le casting en tant que tel ! http://david-pagnon.com/fr/mode-demploi-pour-une-vie-chaotique-2
[3]↑ Les faire-parts de mariage finalement terminés.
[4]↑ En principe ? Ouais en principe, ouais !