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Le parkour trace sa route

Le parkour trace sa route Mars 2012, Science et Vie Junior, Grenoble

Le parkour trace sa route

Le parkour, la discipline des Yamakasi et autres fous bondissants, fait de plus en plus d’adeptes. Envie de suivre leurs traces? Accrochez-vous, ça va secouer!
Par Delphine Jung et Aurélie Bordenave

Franchir des obstacles de quatre mètres de haut en trois bonds, marcher sur les murs ou sauter d’immeuble à en donner le vertige aux chats de gouttière? La routine pour les héros de la série de jeux Assassin’s creed et bon nombre de méchants hollywoodiens (comme ceux de Casino Royale, l’un dezs derniers James Bond). Mais dans le vrai monde aussi, des centaines de personnes sont capables de telles prouesses. Ces ninjas urbains se surnomment les “traceurs”, parce qu’en se déplaçant en ville, ils ne suivent pas les chemins balisés par les trottoirs et les escaliers: ils tracent leur propre voie, en utilisant tout ce que le mobilier urbain peut offrir d’appuis, de surface et de tremplins. Murs, plots, barrières, branches d’arbre et lampadaires, tout est bon pour bondir. Ce que les citadins ordinaires perçoivent comme des obstacles, les adeptes de cet étrange mélange de gymnastique, d’escalade et d’acrobatie en font des supports pour se déplacer le plus facilement possible à travers la ville.
Cette discipline porte un nom, le parkour, et elle est née… en France. Son inventeur se nomme David Belle, et ce n’est pas exactement un inconnu: il a fondé les Yamakasi, un groupe de traceurs rendus célèbres dans le monde entier par un film sorti en 2001. David Belle tenait aussi le rôle principal dans Banlieue 13, sorti en 2004. C’est lui qui a forgé le terme “parkour” pour baptiser l’étrange discipline que lui avait enseignée son père, Raymond Belle. Ce dernier était “enfant de troupe” durant la guerre d’Indochine (1946-1954): orphelin, recueilli par l’armée, il a été entraîné dès son plus jeune âge, et notamment à se déplacer vite et discrètement en forêt. Il a poussé son entraînement jusqu’à flirter avec l’acrobatie, inventant des techniques pour sauter d’arbre en arbre façon chimpanzé.

LA MODE DU SAUTE-BÉTON
Raymond Belle va enseigner à son fils les mouvements qu’il a développés dans la jungle; le jeune David apprend vite et adapte ces techniques au milieu urbain. Il s’exerce jour et nuit à défier toutes sortes d’obstacles, en solitaire. Jusqu’à la fin des années 1990, où son frère la filme en action et envoie une vidéo à l’émission de télévision Stade 2. Ce gaillard qui défie la gravité scotche les présentateurs… et les téléspectateurs; certains se mettent à l’imiter. Le phénomène devient ultramédiatique: on retrouve des traceurs dans des spectacles, des pubs, des films, etc. La mode dépasse les frontières et des jeunes du monde entier se mettent à jouer à saute-béton, popularisant le nom de baptême donné à la discipline par David Belle: le parkour. Des dizaines de vidéos en témoignent sur Internet: on ne compte plus les fractures des jambes, du crâne ou les colonnes vertébrales abîmées chez les Yamakasi du dimanche qui se sont lancés, sans réfléchir, dans des situations potentiellement mortelles… Et c’est logique: seul un entraînement très poussé peut donner la souplesse, la vitesse et le sang-froid indispensable pour faire ces acrobaties en toute sécurité. Les traceurs dignes de ce nom ont un code: on ne doit jamais se mettre en danger! “C’est uniquement quand tu “sens” un saut que tu peux le faire”, explique Jean-Marie Gallée, 23 ans, président de l’association Ouest Parkour et sept ans de pratique dans les pattes. “Les jeunes qui débutent font les fous, veulent nous imiter sans préparation. Nous, on est là pour les calmer, leur apprendre d’abord à connaître et maîtriser leur leur corps. Le parkour, c’est pas “ça passe ou ça casse”, poursuit-il.

YODA, JEDI ET TRACEUR !
Dans Star Wars, une phrase de Yoda, petit Jedi et grand traceur, résume bien cette philosophie: “Fais-le ou ne le fais pas, mais n’essaie pas.” C’est pour ça que les traceurs pratiquent leur discipline au sein d’associations, regroupées en une nouvelle fédération qui fête son inauguration le 14 avril à Dijon (voir “Pour en savoir plus”). Niveau matériel, il suffit d’une paire de baskets -premier prix car elles ne durent pas!- et d’un jogging pour bouger à l’aise. Les novices commencent par des exercices au ras du sol, puis sur des murets… mais jamais à plus de 1.5m de haut. Même dans le cadre sérieux d’une association, les blessures ne sont pas rares, mais cela va rarement plus loin qu’un doigt écorché ou qu’une cheville foulée. Reste une question: c’est bien beau d’escalader les murs de la bibliothèque ou les barrières de l’école… mais est-ce légal? La gendarmerie est formelle: si le bâtiment n’est pas une propriété privée, elle n’a aucune raison d’intervenir. En revanche, s’il s’agit d’un domicile ou d’un local privé, c’est interdit. Les traceurs doivent donc rester dans l’espace public, trottoirs et parcs par exemple. Et pas question d’endommager l’équipement urbain: David Pagnon, membre de l’Association grenobloise de parkour, est intransigeant: “Impact zéro sur l’environnement!” Les traceurs s’imposent notamment d’effacer les traces que leurs semelles ont laissées sur les murs. Eh oui, être bien élevé, ce n’est pas qu’une question de hauteur, même chez les acrobates!

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