Préparer son sac
Article écrit en tant qu’annexe de mon récit Une tente, Un pouce, un carnet de voyage de mon retour du Liban en autostop, bien animé par de nombreuses aventures…
Ma liste à la fin de l’article
Introduction
Que mettre dans son sac pour un long voyage en complète autonomie ? C’est une question difficile, et je ne fais pas forcément les bons choix moi-même… Je suis très loin d’être un expert en la matière. Car très honnêtement, pour mon retour du Liban je ne suis pas parti à l’aventure après avoir soigneusement compilé et analysé les données. Bien au contraire, j’ai pris le départ sans autre plan qu’un objectif final, en improvisant mes destinations au fur et à mesure des rencontres locales. Également, il me semble que j’ai une certaine propension subconsciente (ou inconsciente ?) à me jeter de mon propre chef dans la galère, pour le simple plaisir voir si je suis capable d’en sortir. Je m’émerveille toujours autant des ressources d’un être humain en situation désespérée.
C’est une motivation que d’aucuns pourraient trouver stupide, voire malsaine. Je ne vais pas ici tenter de les détromper. Quoi qu’il en soit, je suis convaincu que ce n’est pas une attitude que je peux raisonnablement conseiller à qui que ce soit, elle peut vraiment vous mettre en danger si vous échouez à vous fixer des limites raisonnables par simple goût du défi.
Malgré tout, peu à peu j’ai appris quelques éléments, que je vous partage ici.
Quelques principes
Pour en revenir au sujet, la principale difficulté est d’avoir un sac de la bonne taille : avec suffisamment de matériel pour parer à toutes les situations, sans être trop lourd ni encombrant. Tout dépend en fait du lieu de destination et de la saison: s’il fera froid, forcément le sac sera bien encombré par les d’habits; et si l’expédition a lieu dans un désert vierge et sauvage on aura soin de prendre des réserves de nourriture et d’eau ainsi que de quoi cuisiner.
Lors de mon retour en autostop du Liban, je concède n’avoir pas choisi les conditions les plus arrangeantes : je suis parti en hiver, dans l’optique de séjourner à la fois en ville et dans la nature. En outre, il me fallait embarquer tout ce que je n’avais pas pu, ou pas pensé à renvoyer du Liban par la Poste…
Habillement
En termes d’habits, j’ai donc d’abord pris 4 paires de chaussettes et 3 caleçons (des slips auraient pris moins de place). Puis j’ai pris 2 jeans, 2 chemises, 1 T-shirt et 1 short. Enfin, pour le froid j’ai emporté dans l’ordre, 1 collant de jogging pour le bas, et pour le haut 1 T-shirt synthétique proche du corps, 1 polaire, 1 veste soft-shell, 1 veste Gore-Tex et 1 kefieh (mes goûts ont tranché pour le kefieh, mais il y a plus efficace : le buff ou tour-de-cou). Je lavais ces habits au savon dans des toilettes publiques. Ils deviennent un peu craquants avec le temps mais c’est jouable.
C’est plutôt peu et pas forcément très bien choisi: bien que je ne sois pas très frileux, j’avoue avoir déjà eu (très) froid. Il existe quelques principes qui permettent d’optimiser le rapport encombrement/chaleur, qui m’auraient bien rendu service si je les avais su. Plus l’habit est près du corps, plus il doit être respirant pour évacuer la transpiration; plus il s’en éloigne, plus il doit être imperméable et coupe-vent. La première condition est satisfaite avec des tissus synthétiques ou de la laine (pas de coton!); la seconde avec des membranes spécifiques. Gore-Tex fabrique actuellement les meilleures membranes externes, puisqu’elles laissent passer la transpiration vers l’extérieur, mais sont imperméables à la pluie dans l’autre sens. En couche intermédiaire, le meilleur choix se porte probablement sur les polaires. Et le choix le plus économique, sur du papier journal roulé en boule entre deux couches d’habits. Toutes ces couches peuvent être très fines, la chaleur n’est pas tant assurée par le volume que par l’isolation que fournit l’air entre chaque couche.
Attention, ces considérations ne sont pas à négliger! Avec la fatigue et la vie de jour comme de nuit en extérieur, on devient bien plus sensible au froid. En cas de grosse galère en ville, on peut toujours insérer du papier journal froissé entre deux couches d’habits, ou dormir sur du carton. En pleine nature, c’est plus compliqué, surtout par temps humide… J’en sais quelque chose.
J’ai enfin ajouté à ma liste une petite serviette microfibre, du savon dur pour le corps et les habits, des têtes de rasoir (le manche sert à rien) et une tête de brosse à dents.
Logement
En plus des habits, il me fallait emporter de quoi me loger. Je me suis donc procuré une tente (bon marché), un tapis de sol (inutile s’il fait chaud), et un sac de couchage (température de confort, 15°C : très mauvais choix !). Je suis parti dans l’idée de faire confiance à ma couverture de survie, qui tout étant extrêmement peu encombrante bloque le rayonnement infrarouge chaud émis par le corps et permet de conserver sa chaleur. Encore un exemple de mon inexpérience et de mon imprudence : une couverture de survie est en plastique, elle conserve donc autant la chaleur que l’humidité. De quoi finir les nuits trempé…
Par ailleurs, une lampe frontale a toujours prouvé son utilité dans la nuit.
Nourriture
Au niveau nourriture, je prenais de l’eau (1,5L par jour, ce qui même en hiver est vraiment le strict minimum si on veut cuisiner, j’en conseillerais facilement le double), du riz, du pain, et selon les pays n’importe quoi tant que ça ne prenait pas de place et que c’était bourratif. Je conseille de cuisiner du riz plutôt que les pâtes, puisqu’il est plus nutritif et se cuit avec relativement peu d’eau; en revanche il est plus long à cuire donc consomme plus de gaz… Pour cuisiner le tout je transportais un réchaud et une popote (pack casserole-assiette-couverts). Un ami suisse m’avait donné des rations de survie que je n’ai pas eu à utiliser.
J’ajouterais qu’en occident, on a pris l’habitude de manger beaucoup plus que ce dont on a besoin: malgré mon appétit réputé, la faim qui me taraudait les premiers jours s’est bien vite calmée, et mes deux tartines et mon bol de riz par jour m’ont ensuite amplement suffit.
Urgence
J’avais en outre une trousse de survie avec des pansements, des médicaments d’urgence et des pastilles de purification d’eau. Le genre de choses que je n’utiliserai probablement jamais, mais que je me maudirais de ne pas avoir emporté si le besoin se présente. C’est toujours bien de prendre aussi un peu d’argent, une attestation d’assurance maladie et ses papiers (et de ne pas les perdre, mission à laquelle j’ai lamentablement échoué).
Petit matériel pratique
J’ai aussi transporté du petit matériel, qui prend peu de place mais qui peut s’avérer utile : une chambre à air (très pratique pour accrocher facilement n’importe quoi n’importe où), 3 mousquetons, une cordelette, du fil de pèche, un briquet, un brassard réfléchissant de vélo pour le stop et un bouchon de liège (brûlé au briquet, il fait office de feutre qui permet d’écrire sur un carton le nom de la ville où on veut se rendre).
À part ça
A part ça, j’avais pris de quoi conserver des souvenirs. Un appareil photo, un netbook (une tablette ferait l’affaire maintenant, la taille et la durée de la batterie répondent aux mêmes besoins), un chargeur solaire, un carnet pour coucher mes pensées avant de me perdre dans les méandres de mon esprit torturé.
Également, j’avais de quoi me distraire lors de ces longues périodes de solitude : des livres (trop), un couteau (papillon pour jouer avec) et un harmonica.
Et ça aurait été bien d’avoir des préservatif aussi, maintenant à coup sûr je vais me retrouver avec des gosses pondus de partout dans le monde qui ne connaîtront jamais leur père… STOP, je plaisante, riez maintenant ! Leur imperméabilité et leur élasticité rendent ces récipients intéressants pour diverses tâches.
En revanche, dans certains pays il m’a manqué un dictionnaire : c’est parfois compliqué de se débrouiller uniquement avec le Français, l’Anglais ou l’Allemand, surtout lorsqu’on fait du stop et qu’on est supposé communiquer. M’enfin la langue des signes c’est limité, mais ça ne marche pas si mal.
Conclusion
Cette liste ne prétend être ni exhaustive, ni adaptée à tout le monde. À l’inverse, il suffit d’être un peu plus expérimenté, d’être prêt à oublier un peut de confort et de voyager dans un pays plus chaud pour pouvoir encore réduire drastiquement la liste. J’ai par exemple rencontré à Chypre quelqu’un qui se balade toute l’année à travers le monde avec son petit sac à dos, dans lequel il a un short, 2 T-shirts, une mini tente et un mini sac de couchage. Pas de sous-vêtements, pas de chaussures ni de chaussettes, c’est un ouf le gars. Et comme tout ça ne prend pas trop de place, il embarque une source de revenus avec lui, un yukulele: s’il a quelque chose à acheter, il va jouer une heure dans la rue et il revient avec l’argent nécessaire. Et s’il veut se retirer dans la nature ou dans des coins perdus, il joue un peu plus et fait assez d’économies pour y vivre. Une version tout personnelle des campagnes de levées de fond… Il vit sa vie sans aucun souci, Hakuna Mataka comme on dit en Swahili !
Et niveau planning? Niveau planning?!!… Comment ça niveau planning, c’est quoi ce délire, déjà planning c’est un mot Anglais et on est en France, et en plus la vie est quand même plus intéressante quand on ne sait pas de quoi sera fait le lendemain ! Non ? D’accord, un autre argument alors: un bon moyen de nouer le contact avec la population locale est de leur demander ce qu’il y a d’intéressant à visiter dans le pays, et qui se trouve plus ou moins sur le chemin. Faire un planning, c’est le meilleur moyen de se limiter. Toutefois, il est utile d’avoir une carte, ne serait-ce que pour savoir où on se situe dans le monde. Une pauvre impression de Google Map n’est pas mal non plus, elle laissera plus d’incertitude et de piment.
Quant-aux impondérables, j’ai un point de vue qui m’est tout personnel: « C’est quand les problèmes surviennent que les choses deviennent intéressantes« .
Ma liste
Voilà. Comme toujours c’est plutôt long à lire (et à écrire), et ce n’est pas sous forme de liste donc difficile à exploiter. Je reprends de façon plus académique : ce qui est en gras suffit pour un voyage estival, ce qui est en italiques n’est pas indispensable mais permet de se sentir humain, et vous pouvez vous passer de ce qui est (entre parenthèses) s’il y a des villages à proximité:
- 1 sac à dos, 1 sac de couchage, 1 tente, 1 lampe frontale, 1 tapis de sol
- 1 ensemble de sous-vêtements longs contre le froid
- 1 short léger, 1 T-shirt, 2 jeans, 2 chemises -> 1 seul de chaque en été
- 1 petite polaire, 1 autre polaire
- 1 veste type Gore-Tex, 1 poncho
- 4 paires de chaussettes, 3 caleçons, 1 buff, 1 paire de sous-gants, 1 kefieh
- Des chaussures de montagne, des chaussures running
- 1 serviette en microfibre, 1 trousse avec du savon dur, des médocs d’urgence, une tête de brosse à dents, 1 couteau aiguisé, des têtes de rasoir, (des pastilles de purification)
- 3L d’eau, de la nourriture compacte, du sel et du sucre, (1 réchaud, 1 popotte)
- (1 scie à main, 1 chambre à air, 3 mousquetons, 1 cordelette, du fil de pèche, 1 bouchon de liège, 1 briquet, 1 guide de survie)
- Quelques feuilles pour le stop, une chemise plastifiée, 2 stylos, 1 brassard réfléchissant
- 1 harmonica, un couteau papillon, 1 cahier, des livres, quelque chose pour passer le temps
- 1 lampe frontale, 1 appareil photo, (1 netbook, 1 portable, 1 chargeur solaire)
- Un peu d’argent, 1 attestation d’assurance
- 1 petit dictionnaire, 1 carte google maps
Il est important d’avoir TOUT le matériel nécessaire, mais c’est également intéressant de ne pas avoir un sac plein à ras bord, pour pouvoir y ajouter des souvenirs au fur et à mesure, sans galérer tous les jours à le fermer. Dans la même idée, pensez à ranger vos affaires de façon à savoir retrouver rapidement les plus importantes et celles qui seront le plus fréquemment utilisées.
Et pour finir, la qualité de votre matériel ne sera pas forcément importante pour utilisation occasionnelle – à condition que les fonctions d’imperméabilité, de respirabilité, et de sécurité restent assurées, la grosse différence se fera sur le poids. En revanche pour les grandes expéditions, la solidité est un facteur primordial sur lequel il sera pertinent d’investir.